Médecin gériatre au Centre Jacques Calvé (1), chef de service de l’unité réadaptation ortho gériatrique/réautonomisation, président du comité éthique de la Fondation Hopale, Thierry Bierla reçoit les patients dans le cadre de la prise en charge du syndrome de fragilité. En tant que médecin, il observe ce qui se joue avec les proches, souvent ancré dans l’histoire familiale et met en garde contre la dérive d’assimiler le don de soi à l’amour. En tant que citoyen, il interroge une société qui a dans sa devise les mots de Liberté, Égalité, Fraternité mais qui ne se donne pas les moyens d’offrir aux plus vulnérables l’aide dont ils ont besoin sans reporter sur l’entourage des tâches et gestes de soin qui ne sont pas de leur ressort.

Je ne cesse de ressasser que, en voulant tout faire pour leur conjoint, ils confondent le rôle et la tâche. Je leur dis qu’ils n’ont pas à laver leur conjoint mais que leur rôle majeur est de veiller à ce que les professionnels du soin accomplissent correctement la tâche pour laquelle ils sont formés et rémunérés. Cette tâche ne doit pas leur retomber sur dessus, parce qu’ils sont là, au domicile. J’entends alors : « mais, vous comprenez Docteur, c’est mon mari quand même… ». Pourtant, leur rôle premier consiste à être le conjoint ou l’enfant, et non le soignant, et ils doivent être entendus dans l’expression de leur droit à n’être pas parfait, malgré l’amour dont ils sont pétris. Être aidant n’est pas une identité et il est impératif de distinguer l’aidant de l’aimant.

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